La première anthologie de la poésie nippone date de VIIIe siècle, elle comprend de plus de 5000 poèmes composés par des empereurs, des samouraïs, des officiers, des fonctionnaires, des impératrices, des princesses, des filles, des soldats, des mendiants, etc... elle représente toute la nation.
Personne ne se disait "poète" ou "poétesse", mais tout le monde l'était. C'était l'idéal de l'esprit nippon. Celui qui n'a pas sa conscience libérée des connaissances infimes ne peut composer des poèmes de, soit 7 syllabes, soit 17 ou soit 31.
"Haiku" est une dérivée de la poésie nippone ancienne. Son fondateur est Basyô. Un jour, il recevait son ami, un prêtre bouddhiste. La conversation était tranquille parce que la parole perd l'amitié profonde. L'entrevue presque sans parole suffit à ceux qui saisissent tout par leur instinct-intuition clairvoyant.
"La Loi Unique avant la végétation de la mousse qu'était-elle?" dit le bouddhiste en regardant le jardin de Basyô couvert de mousse. Le poète ne répondait pas...
Un bruit bas, imperceptible, vibra et consolida la tranquillité. C'était une grenouille qui sautait dans l'étang.
Ni le prêtre, ni le poète ne bougeaient.
" Un bruit dans l'eau que fait une grenouille, n'est-ce pas? " dit le poète. ( Il a fait une esquisse de Taikyoku* par un bruit imperceptible produit dans l'eau, qui s'éteint dans la tranquillité. Il a traduit la profondeur de la mer de Taikyoku par la tranquillité, et les êtres éphémères, qui s'éteignent et rentrent dans l'univers-éther sans cesse, par ce bruit bref qui s'éteint dans l'infini. Et cela signifie, en répondant à son hôte, que la Loi Unique dans le monde préhistorique, où la végétation de la mousse n'est même pas encore parue, est insaisissable comme ce bruit qui s'éteint ).
" Le bruit dans l'eau que fait une grenouille, c'est merveilleux! Merci ", murmura le prêtre satisfait.
Un bruit dans l'eau du vieil étang
que fait une grenouille en sautant !*
La traduction fait perdre la noblesse et la simplicité du style qui caractérisent la philosophie de l'intuition.
Haiku, c'est le plein centre de l'univers Sûnnya, où il n'y a aucune trace des êtres, aucun sentiment, aucune subjectivité, ni objectivité, c'est au delà du sentiment, des connaissances, de l'humanité, de la miséricorde bon marché.
Tout le monde aime Haiku, mais il n'y en a aucun enseignement public. Haiku est tellement simple et facile à apprendre. Il n'y a aucune difficulté d'arranger des mots en ordre de 5, 7, 5 syllabes. Pour arriver au point le plus élevé du Haiku, tout dépend de la "conscience" de la faculté qui peut contempler la nature intime dans tous les êtres.
Chaque poème, chaque Haiku, est une expression esthétique et intuitive des phénomènes évoluant à travers la nature.
* souvent traduit ainsi : dans une vieille mare - une grenouille saute - le bruit de l'eau
* Taikyoku : "la nature intime" ou "l'univers-éther-prépolarisation"
Georges Ohsawa : Le Principe Unique de la Philosophie et de la Science d'Extrême-Orient (1931)
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